Rires en boîte
L’utilisation des rires enregistrés (laugh track) dans les séries télévisées est devenue monnaie courante en France et un peu partout dans le monde. Cette pratique on ne peut plus kitsch, qui existe déjà depuis plus de cinquante ans aux Etats-Unis dans les sitcoms, est employée pour donner l’illusion que les émissions ont été enregistrées en public et surtout pour signaler un gag et persuader les téléspectateurs que celui-ci est irrésistible. À croire que les producteurs de l’émission ne sont pas si sûrs que ça de leur humour à moins qu’ils ne prennent tout bêtement le téléspectateur pour un âne. À quand des sous-titres indiquant « RIEZ » ou « SOURIEZ » ou encore, pourquoi pas, aux moments les plus dramatiques, « SURTOUT NE RIEZ PLUS » !
Mais trêve de plaisanterie, pendant l’Antiquité, après tout, ne payait-on pas des femmes pour pleurer, se lamenter et vociférer de douleur pendant les funérailles ? Et si cette pratique, sait-on jamais, devait revenir à la mode, on imagine que ces pleureuses seraient avantageusement remplacées de nos jours, la technique aidant et compte tenu de la difficulté de trouver du personnel compétent, par des pleurs enregistrés diffusés tout autour du cercueil, histoire d’indiquer aux gens pas encore convaincus de pleurer que pendant des obsèques, ce n’est pas vraiment le lieu ni le moment de rigoler. Mais le comble du mauvais goût, pendant qu’on y est, serait de payer des figurants et des comédiens pour grossir l’assistance participant à la cérémonie funèbre en prenant soin de leur donner, dans une distribution savamment élaborée, des rôles d’hypocrites, de personnes sincèrement tristes, de gens divers venus seulement se faire voir ou même de vieux cousins oubliés de la famille du défunt. Et, après le cimetière, tout se terminerait, comme il se doit, au cours d’un banquet bien arrosé, dans la liesse collective amplifiée par des rires enregistrés et des pancartes indiquant avec précision les moments où l'on est tenu de s'esclaffer.
1 commentaire:
quel monde bien pitoyable que ce scénario du rire ou des pleurs artificiels et organisés par ces nouvelles sociétés de service ... mais c'est la cruelle loi de l'hypocrisie encore une fois qui l'emporte ...
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