dimanche 27 janvier 2008

Fatrasie

Non ce n’est pas une île lointaine d’Océanie peuplée de gens bizarres et pourtant c’est bien de bizarreries qu’il s’agit. D’ailleurs, s’il fallait la situer géographiquement ce serait plutôt à Arras qu’il faudrait penser. Imaginez un poème, plus exactement un onzain assez particulier n’ayant ni queue ni tête traduisant une pensée incohérente dans un langage qui ne l’est pas moins, avec parfois un contenu caché satirique et pamphlétaire, vous obtenez par exemple :

Je vis toute la mer
S’assembler sur terre
Pour faire un tournoi
Et des pois à piler
Sur un chat montés
Firent notre roi.
La-dessus vint je ne sais quoi
Qui prit Calais et Saint-Omer
Et les mit à la broche,
Les faisant reculer
Sur le mont Saint-Éloi.


Et ainsi de suite. Non ce n’est pas de l’écriture automatique ni de la pataphysique, encore moins de l’Oulipo. Enfin un peu de l’Oulipo tout de même, mais de l’Oulipo par anticipation selon les règles de ce dernier puisque cet extrait est d’un certain poète médiéval, Philippe de Beaumanoir (1250-1296), qui excella dans ce que l’on appelle la fatrasie, genre littéraire complexe donnant dans le non-sens à tout va à travers une expérimentation du langage digne d’André Breton.
Mais au fait, pourquoi Arras ? Tout simplement parce qu’une école arrageoise s’illustra dans cette fantaisie littéraire comme en témoigne un recueil d’auteur inconnu, Les Fatrasies d’Arras, conservé à la bibliothèque de l’Arsenal.

27 janvier 2008 Publié Non classé | Lien permanent | Pas de commentaire » |

jeudi 24 janvier 2008

L'humour de Dario Josa

Le blog du dessinateur Dario Josa Illustrator (ou à raison) vaut absolument le détour. Ses dessins d’actualité, et ses caricatures, qui valent largement ceux publiés dans Le Monde de Plantu, Pessin ou Pancho, sont impayables et se passent de commentaires. C’est pourquoi je m’abstiendrai d’en faire et vous invite à les déguster dare-dare. Vous ne ne serez pas déçus. Sans doute aurez-vous comme moi un seul regret quand même, que Dario Josa n’en publie pas plus souvent parce que des dessins comme ça, avec un tel talent, on en redemande à la pelle.

http://dario.blog.lemonde.fr

dimanche 20 janvier 2008

Aphorismes

La satisfaction de faire rire un triste sire n’est rien à côté du bonheur de faire pleurer un imbécile heureux.

Les purs esprits n’ont pas d’hormones.
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Aphorismes personnels in Aphorismes de comptoir, Editions L’Adret-1999

mardi 15 janvier 2008

Sophisme

Le slogan de mai 68 Il est interdit d’interdire ne manque pas de sel. Car, si on le prend au mot, c’est déjà une interdiction et il signifie donc qu’interdire n’est pas interdit puisque précisément c’est interdit d’interdire ce qui revient à dire : Il est interdit d’interdire d’interdire puisqu’il est interdit d’interdire. Et ainsi de suite, avec le même raisonnement Il est interdit d’interdire d’interdire puis Il est interdit d’interdire d’interdire d’interdire puis Il est interdit d’interdire d’interdire d’interdire d’interdire etc. Peut-être aurait-il fallu dire : Il n’est pas autorisé d’interdire si on veut bien admettre que ce qui n’est pas autorisé est interdit alors que tant de choses non autorisées ne sont pas interdites puisqu’on les tolère. À moins que la meilleure solution n’eût été tout bêtement de supprimer le mot interdire du dictionnaire… Mais là, j’en suis interdit.

jeudi 10 janvier 2008

Conseil de lecture (aux cabinets ?)


Lire ou ne pas lire aux cabinets, telle est la question métaphysique soulevée par Henry Miller (1891-1980) dans un petit opuscule de 60 pages publié en 2007 aux éditions Allia, lequel correspond lui-même au treizième chapitre (Reading in the Toilet) d’un livre que l’écrivain américain publia en 1952 aux États-Unis et qui fut traduit cinq ans plus tard en France, The books of my life. L’argument fondamental de ce chapitre est que, si les gens lisent des revues, des romans, des journaux, des bandes dessinées ou tout ce qui leur passe par la tête la plupart du temps sans discernement, lorsqu’ils sont assis sur le trône, c’est parce qu’ils ont peur de se trouver face à eux-mêmes c’est-à-dire en face d’un vide qui leur est insupportable, et pour fuir aussi bien le désœuvrement que les questions essentielles, préférant se perdre à faire plusieurs choses à la fois comme ils le font en permanence dans le reste de leur vie. Selon l’auteur, “Le fait que vous lisiez tel genre de littérature aux cabinets et tel autre ailleurs devrait être lourd de sens pour le psychiatre. Le fait même que vous ne lisiez pas aux cabinets devrait être lourd de sens pour lui.” Et il ajoute plus loin : “On estime que ce que chacun fait aux cabinets ne regarde que lui. Il n’en est rien. Cela concerne l’univers tout entier.”. Ce manque de philosophie et de sagesse si répandu qui pousse à lire quand on vidange ses intestins et que condamne avec humour et pertinence l’auteur du Tropique du cancer, est bien mis à mal quand il nous explique tous les stratagèmes qu’un mari peut utiliser pour déloger son épouse qui s’éternise aux toilettes à cause de la lecture ou comment la dissuader de recommencer en mettant bien en évidence au water-closet un exemplaire de la Catherine de Médicis de Balzac, dont l’époux aura pris soin de souligner un extrait particulièrement ennuyeux. Lire aux cabinets, en revanche ne l’est pas du tout, il se lit d’un trait et on a l’impression d’entendre la voix d’Henry Milller nous prenant à partie avec bonhomie dans un monologue vif, délicieux, parfois même délirant ou onirique pour nous remettre sur les chemins de la sérénité.

mardi 8 janvier 2008

Retouches


Imaginez que vous soyez dans une pinacothèque et qu’un des visiteurs déambulant dans les différentes salles du musée sorte soudain une palette et des pinceaux pour retoucher l’une des toiles exposées. Vous seriez sans nul doute partagés entre l’ahurissement et l’hilarité. Eh bien c’est exactement ce qui se passa un jour quand un petit monsieur déjà d’un grand âge entreprit dans un musée de faire des retouches sur l’une des toiles d’Oskar Kokoschka (1886-1980), peintre autrichien et l’un des représentants majeurs de l’expressionnisme. Mais le plus drôle reste à venir car le vandale, qui fut immédiatement arrêté par les gardiens, n’était autre qu’Oskar Kokoschka en personne, lequel n’était pas parfaitement satisfait d’un de ses tableaux dont il s’était pourtant séparé depuis fort longtemps ! On raconte que Pierre Bonnard (1867-1947), l’un des peintres des Nabis, fit de même et connut le même sort après avoir pénétré dans un musée, ses pinceaux cachés sous sa gabardine ! D’où l’avantage d’être écrivain ou compositeur pour lesquels il est toujours possible de leur vivant de publier de nouvelles éditions revues et corrigées de leurs écrits ou d’apporter des variantes d’interprétation de leurs musiques. Mais pour les peintres, qu’on se le dise : l’œuvre une fois donnée ou vendue est in(re)touchable à jamais.

samedi 5 janvier 2008

La hache et le calumet


L’heure est grave, car, en ce début d’année 2008, je crains le pire. Tout porte à croire, selon les informations qui sont en ma possession, qu’une guerre ou plutôt une gué-guerre se prépare sur le territoire français. Oui vous avez bien lu, un conflit majeur, qui couvait depuis déjà longtemps, risque de se déclarer dans des délais assez rapides faisant un nombre incalculable de victimes innocentes. Si vous pensez à une attaque terroriste style Al Qaida ou à une invasion par une puissance étrangère qui auraient au moins le mérite de mettre tout le monde ou presque d’accord (sauf les collabos éventuels qui sont toujours de sortie dans ce genre de situation), autant vous le dire tout de suite, vous vous mettez les deux doigts dans l’œil. Le conflit dont je parle sera franco-français et il n’épargnera personne puisque nul ne pourra prétendre à la neutralité, on appartiendra obligatoirement à l’un des deux camps et de plus il dépassera tous les clivages sociaux, professionnels, religieux, culturels et même politiques. Autant dire qu’il s’agira d’une guerre civile dans toute sa splendeur.
Mais la première question que je me pose, en cette période d’attente angoissée, est celle de savoir quels seront les premiers protagonistes à déterrer la hache de guerre. Les fumeurs ou les non fumeurs ? Il est naturellement très difficile de répondre à cette question tant les uns et les autres sont, soit très remontés contre la législation en vigueur qui interdit de fumer dans tous les lieux publics, cafés et restaurants inclus, soit, au contraire, soulagés que celle-ci prenne enfin en compte leur revendication, tout en ne cachant pas leur inquiétude quant au respect de la loi par leurs ennemis héréditaires, les fumeurs. On sait en effet que parmi eux certains se sont mis ouvertement en résistance et sont prêts à prendre le maquis ou même à fuir à l’étranger. Mais ce dont on peut être certain c’est que cette guerre risque d’éclater pour une simple étincelle (de briquet ou d’allumette).

Quant à savoir qui a le plus de chances de gagner la bataille, tout dépend de la nature de celle-ci.
S’il s’agit d’une guerre classique c’est-à-dire reposant sur des rapports de force purement physiques, tenons-nous en aux données numériques dont nous disposons. Selon les sondages et Roselyne Bachelot, 80 % des Français seraient favorables à la loi en question et 20 % s’y opposent. Autant dire qu’en cas de guerre classique, en supposant que les clans combattent à armes égales et en excluant les armes nucléaires qui remplaceraient désagréablement les volutes de fumées par un nuage atomique dont personne ne sortirait vivant, ce sont les non fumeurs et leurs adeptes qui s’en tireront vainqueurs.

S’il s’agit d’une guerre philosophique -je parle bien sûr de philosophie appliquée, d’art de vivre, et non des dogmes sèvères des Épicuriens ou des Stoïques, encore moins de Kant, Kierkegaard ou Schopenhauer-, la bataille promet d’être rude et je ne suis pas certain que les non fumeurs gagnent tant est vrai que rien n’est plus sympathique que cette atmosphère enfumée qui règne autour d’un cendrier plein de mégots écrasés nonobstant l’air irrespirable et cette solidarité entre fumeurs qui fait qu’une femme du monde est prête à donner du feu avec complicité au dernier des clochards croisé dans la rue. Disons que dans le meilleur des cas, philosophiquement parlant, on peut estimer les chances de gagner à 50-50.

Le résultat sera le même s’il s’agit d’une guerre idéologique, les deux clans reprochant à l’autre, au nom de la liberté individuelle, de verser dans la dictature, l’un étant accusé de défendre des théories trop hygiènistes -comme chacun sait quant c’est trop propre, ça ne sent pas bon-, les autres d’être des empêcheurs tyranniques de ne pas fumer en rond.

Enfin s’il s’agit d’une guerre écologique, alors là il n’y a pas photo, les fumeurs militants sont sûrs de perdre, de même si la guerre repose sur des arguments de santé publique.

Mais au fait la guerre du tabac aura-t-elle lieu ? Rien n’est certain à l’heure où j’écris car il semble, aux dernières nouvelles, que la majorité des clients des cafés-comptoirs n’est pas si stupide et, que, hormis dans quelques bastions réfractaires, elle est toute disposée à fumer au bistrot dans la plus grande convivialité autour d’apéritifs bien alcoolisés, et sans se renier pour autant, le calumet de la paix.

mardi 1 janvier 2008

Banané 2008 !

Selon que l’on se trouve à Rangoon, en Biélorussie, ou à Berlin, on souhaitera la bonne année en disant respectivement Hnit thit ku mingalar pa, З новым годам (Z novym hodam) ou Frohes neues Jahr. En chinois (ou dans l’un de ses dialectes, je ne sais lequel), il paraît qu’on dit : 新年好 (Xīn nián hǎo).
Parmi toutes les expressions de vœux de nouvel an selon les pays, j’ai retenu celle du créole mauricien qui se dit avec l'accent : Banané ! Non pas que ce mot soit surprenant pour le Francophone que je suis ni qu’il m’ait fait rire mais tout simplement parce que, l’employant depuis ce matin zéro heure pétante, tout le monde en France me comprend sans qu’on ait remarqué que je l’ai prononcé dans la langue parlée à Port Louis. Essayez ! Vous verrez. Reste à savoir, au cas où je prononce ce même mot le 14 juillet, si mes interlocuteurs ne vont pas croire que je les ai traités de couillonnés ou plus simplement de couillons !

Banané 2008 à toutes et à tous !

 
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