L'humour de Cyrano
Deux scènes irrésistibles, parmi bien d’autres, dans le chef d’œuvre d’Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac :
• la première se situe au premier acte juste après la fameuse tirade des nez dans laquelle Cyrano tourne en ridicule le Vicomte, lequel n’a rien trouvé de plus original, pour railler son appendice nasal, que de lui lancer bien banalement :
« Vous…vous avez un nez…heu…un nez…très grand. »
Humilié et ridiculisé par la tirade et par les quelques phrases ironiques de Cyrano qui s’en suivent, le Vicomte réagit par l'insulte :
LE VICOMTE
« Maraud, faquin, butor de pied plat ridicule ! »
CYRANO (en ôtant son chapeau et saluant comme si le Vicomte venait de se présenter) :
« Ah ?…Et moi, Cyrano Savinien Hercule
De Bergerac. »
• la deuxième scène se situe peu avant la fin du deuxième acte : Cyrano, génial mélange d’Alceste et de Don Quichotte, qui vient de subir les railleries de Christian sur son nez s’apprête à lui régler son compte mais ce dernier se présente comme l’homme dont Roxane est amoureuse et que Cyrano, lui-même amoureux de Roxane et homme au grand cœur, a promis à celle-ci de protéger. Cyrano se montre alors brusquement gentil et fraternel avec son rival qui subitement se confond de respect et d’admiration pour le Gascon.
CYRANO (revenant sur les railleries de Christian)
Mais tous ces nez que vous m’avez…
CHRISTIAN
Je les retire !
Naturellement l’humour de ces deux réparties ne saute pas forcément aux yeux, lues comme ça sur le papier ou sur un écran d’ordinateur, mais je peux vous garantir qu’elles sont irrésistibles sur scène, dans le contexte de la pièce, par leur effet de surprise. La preuve, c’est qu’elles m’ont fait rire, moi qui suis très mauvais public pour le comique et à qui il en faut beaucoup pour le faire rire.
Ouvrons une parenthèse : (pour revenir à la tirade des nez, j’ai trouvé la dernière interprétation en date de Michel Vuillermoz dans la mise en scène de Denis Poladylès très gasconne mais peut-être un peu trop rapide alors que celle de Gérard Depardieu, plus lente, m’a semblé un tantinet monocorde et bien peu truculente (pour un Gascon digne de ce nom !), la première interprétation étant à mes yeux infiniment supérieure à la première. Mais c’est un avis très personnel que je ne partage pas moins. Les débats sont ouverts.) La parenthèse est à présent fermée.
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