dimanche 15 avril 2007

Gymnopédiste ou gnossien

Imaginez les partitions d’un grand compositeur de la fin du 19ème siècle-début du 20ème comportant, à la place des annotations classiques en italien type adagio, piano ma non troppo ou andante, des phrases telles que « vivache » (pour vivace), « sur la langue », « postulez en vous-même », « du bout de la pensée », « munissez-vous de clairvoyance », « de manière à obtenir un creux » ou encore « enfouissez le son ». Considéré par Ravel et Debussy comme un précurseur, ce musicien illustre, que vous avez sans doute reconnu et dont vous diriez à juste titre qu’il ne manquait pas de fantaisie, n’est autre qu’Érik Satie. De son vrai nom Alfred Éric Leslie Satie, né à Honfleur le 17 mai 1866 et mort à Paris le 1er juillet 1925, ce compositeur et pianiste français était l’humour en personne. Pour s’en convaincre et sans même parler de sa vie, de sa personnalité et de sa musique proprement dite, il suffit d’énumérer différents titres de ses œuvres, Sonatine bureaucratique (1917), Pièces froides - trois airs à fuir (1897), Pièces froides - trois airs de travers (1910), Embryons desséchés (1913), Trois morceaux en forme de poire (1903), 4 Préludes flasques (pour un chien) (1912), Musique d’ameublement que l’on doit jouer ” pour qu’on ne l’écoute pas ” (1920) et lire certaines de ses citations dont on attribuerait volontiers la paternité à Alphonse Allais ou Pierre Dac. Exemples :

Il ne suffit pas de refuser la Légion d’Honneur ; encore faut-il ne pas la mériter !

Si vous voulez vivre longtemps, vivez vieux.

Si je ris, c’est sans le faire exprès

Au régiment, si par hasard vous êtes tambour, même sur l’ordre du colonel, ne vous avisez jamais de battre la générale

Difficile à croire que ce compositeur de génie avant-gardiste, excentrique et provocant, à la fois sociable et solitaire, n’arriva pas à vivre de son art malgré sa célébrité et, à la grande surprise de ses proches auxquels il cacha sa pauvreté, mourut dans le dénuement.

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Illustration : extrait de la partition Gnossienne n° 3

1 commentaire:

Anonyme a dit…

la provocation s'apparente à une forme d'art, dans la mesure ou elle permet d'exprimer une certaine vision des choses, une forme de philosophie, mais elle implique beaucoup plus son interlocuteur-spectateur qui ne peut pas y rester indifférent ...

 
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